Conte africain : Mourou la panthère et la chèvre

Les exploits sanguinaires de Mourou la panthère étaient devenus si populaires dans la brousse que le gibier se faisait rare.
Le portrait du félin, son allure, ses habitudes étaient identifiés, communiqués aux oiseaux, aux reptiles, aux herbivores et aux rongeurs. Partout où le carnivore passait, tous fuyaient devant lui. Ainsi privée de nourriture, Mourou la panthère mourait lentement. Maigre, chancelante sur ses pattes affaiblies, elle décida un jour d’aller habiter le village de l’Homme.

Elle l’atteignit la nuit et fut accueillie par le chat qui veillait. Elle fut logée dans le creux d’un vieux tronc à proximité de l’enclos de la Chèvre.
A l’aube, le chat vint saluer sa visiteuse chargée d’un plat de souris. Mourou avala ce plat avec dégoût. Durant les jours qui suivirent, elle eut à se contenter de plats de la même espèce, parfois de poulets ou de quartiers de viandes dérobées.

– Il me plaît mon neveu de connaître les mœurs de tes cohabitants, sollicita l’étrangère auprès de son hôte.

– L’Homme mon maître, enchaîna-t-il, est l’animal le plus rusé et le plus intelligent. Il marche sur deux pattes, possède un bâton qui tonne et foudroie de loin.
Le Chien qui ressemble au Loup suit le maître sur ses traces et surveille le village. Il a des crocs puissants. Le Cheval aussi grand qu’un Zèbre sert de monture au maître. Il a des coups de sabot meurtriers. L’Ane, fort, trapu, sert de bête de trait. La Vache, apparentée au Buffle donne du lait. Le Porc, dodu, massif et agressif, à l’allure du sanglier lui donne sa chair. De tous, seule la Chèvre est inoffensive et accueillante.

Mourou se lécha les babines satisfaite.

– J’irais donc visiter la Chèvre. Elle y alla.

– Salut ! Paisible animal, fit-elle. Je viens solliciter ton hospitalité.

-Sois le bien venu dans ma maison, O gros chat répondit la chèvre. Tu vivras de mon lait.

La panthère et la Chèvre vécurent ensemble pendant des mois. Décidée à exécuter un odieux projet qu’elle mûrissait, Mourou demanda à partir.

– Avant de te quitter, scellons une amitié dans le mélange de sang, suggéra-t-elle à sa bienfaitrice. Je ferai une saignée à ton cou, une autre à l’une de mes pattes. Nous recueillerons le sang que nous mélangerons pour boire tous les deux. Par cette alliance, les tiens et les miens connaîtront la paix et l’entraide durant des siècles.

Sans méfiance, la Chèvre tendit le cou. D’un coup de mâchoire, la Panthère l’étrangla et l’emporta toute saignante. Depuis lors, Mourou la Panthère ne cesse de visiter la nuit les enclos à chèvres pour renouveler cette alliance.

(contesafricains.com)



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